Nez #17 sort aujourd’hui, et sera célébré par une soirée de lancement le 4 juin, à la librairie Le Merle moqueur à Paris (75020). Parmi les rubriques habituelles qui mettent l’odorat à toutes les sauces (art, littérature, photographie, sciences, histoire, gastronomie, parfumerie…), le grand dossier traite du lien entre le parfum et l’argent. En guise de mise en bouche, nous vous proposons de lire l’édito de ce nouveau numéro.
Nez #17 sortira officiellement dans quelques jours, couronné par une soirée de lancement le 4 juin, à la librairie Le Merle moqueur, dans le 20e arrondissement de Paris. Du nez des coiffeurs à la parfumerie brésilienne, en passant par les effluves corporels, les senteurs chez Henry David Thoreau, un entretien avec le parfumeur Rodrigo Flores-Roux et le sommelier de thé Benjamin Sieuw, ou encore une plongée dans la culture de l’élémi, nous avons encore mis le nez dans plein de sujets… Avec, en question centrale, celle de l’argent, source de bien des mystères que nous avons tenté d’éclairer : Que sent l’argent mis en flacon ? Comment est calculé le prix d’un parfum ? Peut-on expliquer le grand écart entre des flacons à 10 euros et d’autres à 450 ? Comment sont rémunérées les petites mains qui cultivent et récoltent nos matières premières ? Dans quelle mesure les odeurs constituent-elles toujours un marqueur social ? Combien sont payés les parfumeurs ? Comment l’art olfactif contemporain s’empare-t-il de l’argent ?
Toutes ces interrogations sont passées au crible par les rédacteurs de Nez, offrant une vision panoramique du rapport de l’industrie à son portefeuille. Et au nôtre : quelle valeur pouvons-nous accorder à nos flacons ? C’est ce sujet que soulève l’édito de Jeanne Doré, que nous vous dévoilons ici.
Parce que vous le valez bien
« Tu as senti le dernier Tartempion ? – Ah oui, il est vraiment superbe ! Mais par contre, tu as vu le prix… » Difficile aujourd’hui d’avoir une conversation sur une nouveauté sans en venir au sujet de l’argent. Entre un marché mondial qui pèse près de 60 milliards de dollars, en constante croissance, et des étiquettes qui piquent les yeux, il y a en effet de quoi s’interroger.
Si, comme le dit la rumeur, les matières premières odorantes ne représentent qu’un petit euro dans un flacon, comment ne pas avoir l’impression de se faire arnaquer ? Incarnation d’un rêve qui s’évapore dès qu’on le pulvérise, le parfum entretient une relation ambivalente avec sa valeur. Qu’achète-t-on précisément lorsque l’on passe à la caisse ? De l’alcool ? du verre ? un logo sur un sac ? du pouvoir ? du bonheur ? Pas évident de savoir, surtout quand on ne nous parle que de promesses d’audace et de sensualité, ou de santal du bout du monde, et beaucoup plus rarement du temps long passé à peaufiner une formule, des frais de stockage, de conditionnement ou de distribution, des gens à payer pour présenter, évaluer, peser, assembler, relayer, expédier, vendre tout ça… Le parfum n’est pas un mélange d’huiles essentielles vendu au poids. C’est une industrie, certes, mais c’est aussi une création – plus ou moins inspirée – qui pourrait parfois être uniquement considérée comme telle, sans tenir compte de sa valeur marchande.
Lorsque l’on admire une œuvre dans une expo, qu’elle nous touche, qu’elle nous émeut, ou qu’elle nous perturbe, se pose-t-on la question de son prix ? Quand on sent l’effluve du café matinal, un lilas en fleur dans un jardin ou la fourrure musquée de notre chat, se demande-t-on combien ça coûte ? Est-ce que si c’est gratuit, ça ne vaut rien ? Et si l’on s’attachait à respirer chaque odeur, qu’elle soit naturelle ou composée, simplement comme un plaisir fugace, une émotion, un souvenir, une sensation qui n’appartiennent qu’à nous ?
Jeanne Doré.
- La suite à lire dans le numéro #17 de Nez, la revue olfactive !
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