Nez, la revue… de presse – #22 – Où l’on apprend que l’on mangeait autrefois des glaces à l’ambre gris, que le parfum des roses est dû à un virus et que le flair des chiens est lié à leur vue

Au menu de cette revue de presse, alléchants effluves de caramel, étourdissantes vapeurs d’essence et indémodables « parfums de vieille ».

Entre réchauffement climatique de plus en plus criant et hausse du prix des carburants, les voitures électriques battent des records de vente. Certains, cependant, semblent regretter l’odeur de leurs homologues thermiques – à tel point que Ford a demandé à la parfumeuse Pia Long de créer une composition qui plairait aux accros de l’essence, à l’occasion du lancement d’un de ses modèles électriques. Pourquoi certaines personnes sont accros à ses effluves entêtants ? Parce qu’ils sont associés à des souvenirs d’enfance, que nous y voyons un symbole de puissance ou que le benzène agit comme une drogue sur notre cerveau, lit-on sur le site Grist

Parmi les senteurs d’enfance qui ont parfois des effets addictifs, on citera cependant plus volontiers le caramel. Des chercheurs allemands ont identifié les récepteurs olfactifs qui nous permettent de détecter son délicieux fumet, parmi les 400 dont nous disposons, indique Sciences et Avenir. L’équipe a même mis en évidence deux récepteurs distincts : l’un activé par le furanéol (OR5M3), l’autre par le sotolon (OR8D1), ces composés aromatiques pouvant avoir une odeur de caramel à certaines concentrations.

Si le caramel au beurre salé fait partie du répertoire classique des glaciers, ce n’est pas vraiment le cas de l’ambre gris. On apprend pourtant dans un article de Smithsonian magazine qui explore cet ingrédient mythique de la parfumerie qu’il figurait dans la première recette de crème glacée connue. Suscitant toujours les convoitises, l’ambre gris conserve encore aujourd’hui une part de mystère, notamment quant à sa source : la thèse selon laquelle il est produit par les cachalots lorsqu’ils sont blessés par les becs de calamars qu’ils ingèrent n’est toujours pas prouvée, faute d’intérêt de la communauté scientifique. 

On connaît en revanche désormais l’origine du parfum des roses, nous annonce un article des Echos. Il est dû à un cocktail de plusieurs centaines de molécules odorantes, parmi lesquelles l’alcool phényléthylique, le citronellol et le géraniol – ça, on le savait déjà. Mais le laboratoire de biotechnologies végétales de l’université de Saint-Etienne, qui avait découvert en 2000 que ce géraniol n’était pas fabriqué par les mêmes enzymes dans la rose que dans les autres végétaux, a enfin percé le mystère de cette bizarrerie. Il est question d’un virus et d’une duplication accidentelle d’un chromosome chez l’églantier, à l’origine de la rose du jardinier.

Autre matière première emblématique de la parfumerie, la lavande serait en danger, alerte Public Sénat. Surproduction, prix en chute libre, concurrence de la Bulgarie, attaques de ravageurs, sécheresse, gel, réglementation européenne défavorable… La filière accumule les difficultés ces dernières années. Début août, le Sénat a fait voter une aide de 10 millions d’euros pour permettre l’arrachage de milliers d’hectares, diminuer la surface cultivée et sortir la lavandiculture du marasme. 

Non loin des champs de lavande, celle qui ne connaît pas la crise, c’est Grasse, nous dit Le Monde. Un temps délaissée, la ville attire à nouveau l’industrie du parfum. S’offrir ses propres champs de fleurs grassois, c’est le dernier leitmotiv des marques de luxe, de Lancôme à Dior en passant par Matière première, créée par le parfumeur Aurélien Guichard. La référence à la cité des Alpes-Maritimes sur les flacons devient un gage de qualité, d’authenticité, et un argument de vente à travers le monde, quelle que soit la proportion d’ingrédients locaux dans le flacon – certains commencent d’ailleurs à crier au « Grasse washing »…

À Grasse ou ailleurs, sentir les parfums de la nature améliorerait la santé mentale, d’après des chercheurs de l’université du Kent en Angleterre. Fleurs, écorces, tiges, feuilles… Dans le cadre d’une étude, l’équipe a examiné comment les odeurs perçues dans un environnement naturel contribuent au bien-être des individus au cours des quatre saisons. D’après les résultats, ces senteurs favorisent la relaxation et la joie de vivre.

Des travaux qui montrent encore une fois combien nous sommes sensibles aux odeurs, contrairement à ce qu’avançaient les penseurs du XIXe siècle, associant odorat et bestialité, et qui en concluaient donc que nos narines ne devaient pas être performantes, rappelle Joël Candau dans Le Monde. L’anthropologue des odeurs explique dans une interview le rôle primordial de l’odorat dans notre vie sociale, mise en lumière grâce au Covid-19, et revient sur les travaux scientifiques les plus prometteurs en cours dans le domaine, notamment concernant le langage des odeurs, lui aussi longtemps considéré à tort comme pauvre.

Les chiens ont du flair, c’est bien connu, mais ce qu’on ne savait pas jusqu’ici, c’est que leur odorat est lié à leur vue. Des chercheurs de l’université de Cornell ont réalisé des IRM sur 23 chiens, trouvant des connexions entre le bulbe olfactif, le système limbique et le lobe piriforme, où le cerveau traite la mémoire et les émotions, comme chez les humains, mais aussi des connexions jamais observées chez d’autres espèces animales avec la moelle épinière et le lobe occipital, qui traite les informations visuelles. Ce qui explique peut-être comment des chiens devenus aveugles parviennent si bien à s’orienter dans leur environnement.

Et on termine cette revue de presse avec le Harper’s Bazaar, qui publie un plaidoyer en faveur des « parfums de vieille ». Le magazine de mode se penche sur ces créations lancées entre les années 1920 et 1980 et devenues des classiques en même temps que des inspirations pour une foule de désodorisants, savons et même détergents. En écho au mouvement actuel visant à ne plus genrer les parfums, il serait peut-être temps d’arrêter de leur donner un âge, estime l’auteur de l’article. La perspective d’une génération Z s’appropriant le Shalimar ou le N°5 porté par leur grand-mère n’est pas pour nous déplaire…

Et c’est ainsi que les mouillettes ne servent pas qu’à déguster les œufs !

Visuel principal : © Morgane Fadanelli

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