Monique Rémy, les naturels dans toute leur splendeur

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Fondatrice de la société d’ingrédients naturels qui porte son nom en 1983, Monique Rémy nous a quittés il y a tout juste une semaine, le jeudi 4 janvier 2024. Cette entrepreneuse pionnière dans un monde alors très masculin a milité toute sa vie, selon ses propres mots, « pour les produits naturels, dans toute leur splendeur ». Retour sur le parcours d’une grande dame à laquelle l’industrie doit beaucoup.

Monique Rémy a entamé sa carrière en tant qu’ingénieure chimiste analyste dans l’industrie pharmaceutique, puis au laboratoire de recherche d’Unilever à Paris. Mutée dans la filiale de Grasse, Bertrand Frères (fournisseur réputé de matières premières), elle y établit un laboratoire de contrôle analytique et de chromatographie, alors que le contrôle n’était qu’olfactif. Cinq ans plus tard, l’entreprise rencontre des difficultés, et elle la quitte pour mener une mission similaire au sein de l’illustre établissement Camilli, Albert & Laloue. Nommée directrice technique, Monique Rémy y passe treize ans. 

Forte de ses dix-huit années d’expérience, elle a acquis une vaste connaissance des matières premières et de leur transformation. Fascinée par les produits naturels, leurs secrets et leur complexité, elle voit cette activité diminuer à la même vitesse que la qualité des produits. Chez Camilli, Albert & Laloue, Monique Rémy se bat haut et fort en faveur de produits naturels purs, rappelant leur rôle majeur dans la parfumerie de qualité. 

En 1983, elle crée sa propre entreprise, le Laboratoire Monique Rémy (LMR), avec pour objectif de fournir des matières premières de la meilleure qualité qui soit. Elle décide d’aller à la source, de signer des contrats à long terme avec les agriculteurs, et adopte une approche durable, garantissant des produits purs. Elle axe son activité sur la transformation des concrètes en absolues et promeut des techniques novatrices comme la distillation moléculaire. Elle a pour premier client Chanel : un partenariat déterminant qui lui apporte de quoi développer son entreprise. Ses premières productions pour la marque de luxe sont des absolues de jasmin, de fleur d’oranger et de rose. En 1984, Monique Rémy s’associe avec une petite usine d’extraction d’Aumont-Aubrac, la Sadev (Société aumonaise d’exploitation végétale), qui se consacre aux jonquilles, narcisses et mousses d’arbres de la région. Elle y fait installer un atelier pilote, et dix nouveaux produits naturels font leur entrée (parmi lesquels la cire d’abeille, le son de blé, la sauge sclarée, le lavandin, la lavande, le mimosa, dont elle suit la transformation de A à Z). Son catalogue ne cesse de s’étoffer au cours des quinze années suivantes. LMR devient l’un des fournisseurs de matières premières naturelles les plus prestigieux au monde et rachète la Sadev en 1997. 

Dès 1998, il fallait penser à l’avenir, envisager de développer et d’investir, mais les moyens manquaient. En 1999, IFF a proposé de racheter la société, à la demande de ses parfumeurs, intéressés par la qualité de production et la réputation de LMR. En effet, la société était à même de garantir le niveau d’excellence de LMR, d’investir pour faire face aux exigences de la législation, de développer les partenariats avec les cultivateurs et d’investir dans la recherche et le développement, sans oublier le développement durable. 

En 2000, IFF fait ainsi l’acquisition de LMR. Monique Rémy supervise la transition durant trois ans avant de quitter la société. Passionnée, elle poursuit une activité en indépendante et soutient régulièrement l’Association des amis des jardins du musée international de la Parfumerie à Grasse. 

Au côté d’une poignée de femmes qui a su à cette époque s’imposer dans une industrie alors dominée par les hommes, elle témoignait dans Les Femmes en parfumerie. De la terre au flacon, de Rafaëla Capraruolo : « Si j’ai pu réussir, c’est grâce au fait d’être une femme, car mes concurrents, tous masculins à l’époque, ne se sont pas méfiés de moi, tellement ils étaient sûrs que j’allais échouer, précisément parce ce que j’étais une femme ! ».

Elle s’est éteinte le jeudi 4 janvier 2024 à Grasse, à l’âge de 88 ans.

Ce texte est en majorité issu de la collection LMR + Cahiers des naturels, qui rend hommage à ces matières premières naturelles qui ont peuplé la vie de Monique Rémy.

Visuel principal : © IFF

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