Nez x GDR O3 – Craquer le code combinatoire des odeurs

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La perception olfactive est un processus complexe qui se déclenche lorsque des molécules volatiles entrent en contact avec la muqueuse de notre épithélium olfactif. Cet organe abrite des neurones sensitifs dotés de protéines spécialisées pour la reconnaissance des odorants : les récepteurs olfactifs. Leur rôle est de convertir les signaux chimiques des molécules odorantes en influx nerveux, qui sont ensuite interprétés par notre cerveau comme des odeurs.
Chaque molécule odorante est reconnue par un groupe spécifique de récepteurs olfactifs, et chaque récepteur peut reconnaître plusieurs molécules, créant ainsi un « code combinatoire des odeurs ». Cette théorie a été développée par Linda B. Buck et Richard Axel, qui ont été récompensés par un prix Nobel en 2004. Ce processus sophistiqué basé sur l’identification des molécules par un sous-ensemble de récepteurs olfactifs nous permettrait de distinguer plus d’un trillion d’odeurs. Cependant, le spectre de reconnaissance de 43% des récepteurs olfactifs reste inconnu et le code combinatoire complet n’est connu que pour une poignée d’odorants. 

Une équipe de l’Institut de Chimie de Nice (Université Côte d’Azur), a récemment fait une percée majeure en utilisant l’intelligence artificielle pour décoder ce code combinatoire des odeurs. Ils ont construit une vaste base de données – libre d’accès[1]M2OR: M. Lalis, M. Hladiš, et. al. A Database of Olfactory Receptor-Odorant Pairs for Understanding the Molecular Mechanisms of Olfaction, Nucleic Acid Research. – appelée M2OR, en compilant les résultats d’associations entre odorants et récepteurs provenant de publications scientifiques des 25 dernières années, regroupant ainsi 51 410 paires d’associations.[2]https://m2or.chemsensim.fr/ ; Maxence Lalis, Matej Hladiš, Samar Abi Khalil, Loïc Briand, Sébastien Fiorucci, Jérémie Topin, M2OR: a database of olfactory receptor–odorant pairs for … Continue reading

En utilisant un modèle d’intelligence artificielle basé sur des « réseaux de neurones en graphes » (modèles informatiques inspirés du fonctionnement des neurones biologiques  pour résoudre des problèmes complexes, utilisés dans le deep learning, qui fait partie du machine learning), l’équipe a réussi à prédire le code combinatoire de l’ensemble des 400 récepteurs olfactifs pour les 6000 molécules odorantes connues. Les résultats de cette étude ont été publiés dans la revue annuelle International Conference on Learning Représentations. Bien que le modèle soit encore en développement, il a montré des performances équivalentes à celles des tests fonctionnels en laboratoire.

Au-delà d’une meilleure compréhension du fonctionnement de l’odorat lui-même, ces résultats pourraient trouver un champ d’application en pharmacologie. Car ceux que l’on nomme « récepteurs olfactifs » ne servent en réalité pas qu’à percevoir les odeurs : également présents dans d’autres parties du corps (la peau, les poumons et les spermatozoïdes par exemple) ils jouent un rôle dans la régulation de différentes fonctions métaboliques et sont également détectés dans les cellules cancéreuses. Mieux connaître leur fonctionnement permettra ainsi de les utiliser comme cibles médicamenteuses efficaces.

Visuel principal : © Adèle Chévara

Notes

Notes
1 M2OR: M. Lalis, M. Hladiš, et. al. A Database of Olfactory Receptor-Odorant Pairs for Understanding the Molecular Mechanisms of Olfaction, Nucleic Acid Research.
2 https://m2or.chemsensim.fr/ ; Maxence Lalis, Matej Hladiš, Samar Abi Khalil, Loïc Briand, Sébastien Fiorucci, Jérémie Topin, M2OR: a database of olfactory receptor–odorant pairs for understanding the molecular mechanisms of olfaction, Nucleic Acids Research, 2023; https://doi.org/10.1093/nar/gkad886

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