Anne-Laure Hennequin : « En jouant à Master Parfums, vous bénéficiez du savoir de tous ceux qui font référence dans le domaine »

Formatrice pour des grandes marques de parfum pendant vingt ans, Anne-Laure Hennequin lance Master parfums, un quiz pour approfondir sa culture olfactive tout en s’amusant. Interview.

Auparfum : Qu’est-ce qui vous a amenée à créer Master Parfums ?

Anne-Laure Hennequin : La passion du parfum. Je sniffe tout depuis que je suis toute petite. Comme beaucoup de petites filles, j’avais une collection d’échantillons et de miniatures. Mais contrairement à d’autres qui étaient surtout intéressées par les jolis flacons, je les sentais, j’essayais de les reconnaître, je faisais des concours avec ma tante. Mais je n’étais pas une matheuse, et je n’ai pas été orientée vers le parfum.

Mon truc, c’était plutôt les langues, et je suis partie aux Etats-Unis puis j’ai fait une école de traduction. Comme j’avais toujours cette attirance pour le parfum, j’ai fait mon stage de fin d’études chez Clarins au service formation : j’ai traduit le manuel qui servait à former les équipes. J’ai découvert que c’était le moyen de passer un message, de transmettre une passion : j’avais trouvé ma voie. Après une formation en distribution parfums et cosmétiques (pendant laquelle je passais mes week-end comme conseillère beauté dans les grands magasins), j’ai été formatrice chez Kenzo parfums, cinq ans en France, puis quatre ans aux Etats-Unis. J’étais chargée de faire comprendre l’ADN de la marque et les nouveautés aux vendeuses. Puis j’ai eu envie de rentrer en Europe, mais pas à Paris. Et j’ai passé onze ans chez Puig à Barcelone pour m’occuper de la formation, d’abord chez Prada, puis dans tout le groupe [1].

Comment êtes-vous passée de la formation des professionnels à un jeu éducatif pour le grand public ?

A-L H : Le problème de la formation des vendeuses, c’est qu’on les forme surtout sur les nouveautés et parfois on leur apprend aussi des techniques de vente. Quand vous allez en parfumerie sélective, on vous vend les nouveautés, et de nombreuses Belles au bois dormant restent sur les étagères. C’est une approche promotionnelle axée sur l’image et la communication, et très peu axée sur le produit et ses qualités olfactives. Et c’est difficile de changer la donne.

Après avoir formé des professionnels, je me suis dit qu’il y avait quelque chose à faire pour le consommateur directement. On observe depuis quelques années un intérêt croissant pour le parfum, qui suit celui pour le goût et la cuisine apparu au début des années 2000 : en témoigne le développement des blogs, d’Auparfum, de Nez, de Fragrantica, de musées et l’extraordinaire expansion de la parfumerie de niche. Quand on dit qu’on travaille dans le parfum, les gens sont toujours intéressés. C’est quelque chose qui génère de l’émotion, qui fait appel à nos souvenirs, qui touche tout le monde, et qui reste en même temps un peu mystérieux.

J’ai donc décidé de créer un jeu, selon le principe de l’edutainment (éducation par le jeu) que j’utilisais lors de mes formations, pour donner le sentiment aux gens qu’ils s’impliquent et qu’ils retiennent mieux ce qu’on essaie de leur transmettre.

Comment expliquer que l’éducation olfactive soit aussi délaissée ?

A-L H : L’odorat est le sens auquel on accorde le moins d’importance. Non seulement l’école ne nous apporte pas de connaissances à ce sujet, mais on ne teste même pas notre odorat, alors qu’on subit des tests depuis tout petits pour vérifier notre vue ou notre ouïe. C’est le sens le plus laissé pour compte.

Dans le même temps, tout est parfumé autour de nous : les gels douche, les lessives, les magasins, les parkings, le métro… C’est complètement dichotomique de ne pas travailler cet odorat, alors même qu’il est sollicité en permanence. Pourtant c’est à la portée de tous, tout est une question d’entraînement et précisément d’éducation. Une fois éduqués, les gens se dirigent vers la qualité – même si certains ont besoin de l’image et se diront toujours « Moi ce que je veux, c’est Charlize Theron qui se baigne dans de l’or ». Master Parfums est ma petite pierre à l’édifice.

En quoi consiste le jeu ?

A-L H : C’est un quiz avec 120 questions, de l’histoire du parfum à sa conception et à sa fabrication, en passant par les matières premières et les marques et parfums emblématiques du marché. Il y a des QCM, des vrais ou faux, des photos, et tout le monde peut jouer à partir de 14 ans, qu’on soit néophyte ou connaisseur. Pour rédiger les questions, j’ai beaucoup lu : en jouant à Master Parfums, vous bénéficiez du savoir de tous ceux qui font référence dans le domaine, mais en version ludique. Nous avons pour l’instant une version française et une version anglaise (avec des questions adaptées sur des marques plus anglo-saxonnes).

Ce quiz est un premier pas, puis en avril nous développerons un format plus olfactif et encore plus interactif avec 120 nouvelles questions, et 12 senteurs qui laisseront la possibilité de créer son parfum. Il sera lancé à l’occasion d’Esxence, le salon de la parfumerie de niche à Milan. La prochaine étape sera ensuite un véritable jeu de société avec pas moins de 4 livres et 30 accords à sentir, pour approfondir encore davantage sa culture du parfum.

Master Parfums Pocket Quiz
12 euros + frais de port
En vente sur le Shop by Nez : https://shop.bynez.com/boutique/curiosites/master-parfums-pocket-quiz/

[1] Propriétaire également de Paco Rabanne, Jean-Paul Gaultier, Nina Ricci, L’Artisan parfumeur ou Penhaligon’s, ndlr

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J’aime l’idée. Le problème, c’est qu’un amateur de parfums est en général seul dans un entourage indifférent: pas facile de convaincre des Béotiens de se joindre à vous s’ils sont sûrs de perdre. En revanche, ce serait une occasion pour les parfumistes vivant dans une même ville de faire connaissance.

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