Le parfum, un véritable mode de vie au Moyen-Orient

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Encens, bakhours, attars… le parfum est profondément enraciné dans la culture omanaise, et d’abord sous sa forme originelle de per fumum, à travers la fumée. Cet amour des fragrances, largement partagé dans tout le Moyen-Orient, est lié à la représentation de soi et de l’autre, à ses propres valeurs et aux rites sociaux qui s’incarnent chaque jour ou pour les grandes occasions.

C’est sur ces terres que sont récoltées, transformées et sublimées depuis des siècles les résines aromatiques, les sécrétions magnifiques et les plantes odorantes desquelles la parfumerie puise ses ingrédients les plus précieux : la myrrhe et l’encens proviennent des rivages de la mer Rouge, l’ambre gris flotte au large de la péninsule arabique, la rose damascena pousse dans les montagnes de l’Hajar, à 2 000 mètres d’altitude. Et la chaleureuse cuisine de la région se délecte d’aromates comme la coriandre, la sauge ou la menthe, mais aussi la cannelle et le clou de girofle.

Et c’est également dans le monde arabique qu’est né l’alambic, au ve siècle, et que le procédé de distillation s’est perfectionné quelques siècles plus tard, sous l’influence des alchimistes qui développent des techniques pour extraire les huiles essentielles des plantes et les utiliser dans des parfums. Des méthodes qui ont amélioré l’art de la composition des fragrances et qui, une fois transmises aux Européens via l’Espagne et l’Italie, ont largement contribué à l’essor de la parfumerie moderne.

Savoir-faire ancestral et terroir de choix pour les plantes aromatiques : toutes les conditions sont réunies pour faire du parfum un élément capital du mode de vie oriental, profondément ancré dans la culture omanaise. D’autant que le sultanat jouit d’une position géographique privilégiée. Grâce au développement des techniques de navigation et des routes commerciales, la région voit transiter des produits venus d’ailleurs qui s’invitent dans la liste des ingrédients disponibles pour la parfumerie, tels que le musc de Chine, le safran d’Iran ou le santal d’Inde.

Depuis des siècles, les parfums sont utilisés dans la région pour des raisons culturelles et religieuses. Ils font partie intégrante du patrimoine. Leur usage est promu par la culture islamique au point que les parfums et l’encens occupent une place de choix dans les souks, au cœur de la cité, jamais bien loin des lieux de culte.

Les fragrances sont diffusées lors des prières, des rituels et des célébrations afin de créer une atmosphère sacrée et de favoriser la connexion au divin. 

À Oman et dans les émirats voisins, le parfum est souvent offert en cadeau pour des occasions spéciales et est devenu un signe d’amitié et de respect entre les cultures. Mais il relève également d’un usage quotidien, utilisé à toute heure de la journée pour différentes pratiques, qu’elles soient sociales ou intimes. 

Jamais ailleurs qu’ici le parfum n’a été aussi proche de ses origines de per fumum, à travers la fumée. La pratique de la fumigation dans la maison répond à de nombreux objectifs : se relaxer, purifier l’atmosphère, la rendre agréable, éloigner les mauvais esprits… Tous les foyers disposent ainsi d’un mabkhara, un brûleur traditionnel où se consument sur du charbon ardent quelques gouttes d’huile aromatique ou quelque morceau de bois odorant. On parle d’« encens » lorsque l’on brûle n’importe quelle matière odorante, et pas seulement le frankincense de la région.

Souk de Salalah
© Mulook Albalushi / Amouage

Chaque matin, opération bakhour : cet élément clé de la culture orientale désigne le processus quotidien de fumigation qui consiste à imprégner de parfum les vêtements et tissus d’ameublement de sa maison. Un bain de fumée qui s’étend au corps tout entier pour les grandes occasions : les futures mariées, par exemple, imprègnent littéralement par fumigation leurs vêtements, mais aussi leur peau et leurs cheveux, la veille de leurs noces.

Chez soi, le parfum est également un signe d’hospitalité. Recevoir ses hôtes avec du parfum fait partie du rite d’accueil essentiel à la culture arabe, quelle que soit sa condition sociale. Une atmosphère agréablement parfumée créerait un sentiment d’intimité, de confiance, d’appartenance. Lorsque les invités arrivent, les hôtes leur tendent un aspersoir d’eau florale comme l’eau de rose pour nettoyer leurs mains dans un geste élégant. À la fin du repas, à la place du café et pour indiquer à ses invités qu’il est temps de se retirer, un plateau de parfums est apporté, puis passé d’un hôte à l’autre autour de la table, des fragrances avec lesquelles ils sont incités à se parfumer.

Bois, épices, fleurs, résines, aromates… Parmi les matières premières emblématiques de la région, on trouve des notes boisées et le bois de santal, l’oliban, la myrrhe, l’opoponax et le ciste labdanum, le safran et la cannelle, la rose et le jasmin, le nard et la fleur d’oranger. Dans la liste de ces essences opulentes, l’oud tient une place privilégiée. Rare, cher et très prisé pour se distinguer, il se brûle sous forme de copeaux, tandis que son huile fauve et cuirée entre dans la composition des mukhallats, ces accords traditionnels puissants qui intègrent les formules des parfums moyen-orientaux.

Les senteurs sont également considérées comme un élément essentiel de l’esthétique personnelle et sont souvent associées à la beauté et au bien-être spirituel. Sentir bon va au-delà de l’hygiène, c’est aussi un moyen de ne pas offenser les autres. Si la cérémonie du bain et le nettoyage au savon noir et à l’eucalyptus au hammam constituent un rituel profondément ancré dans la culture moyen-orientale, à la sortie, hommes et femmes s’enduisent le corps et les cheveux d’huile parfumée. Purifier avant de se parer. Jamais avec de l’alcool, bien sûr, mais on utilise de l’huile comme support de composition. Les fleurs, les épices ou les herbes choisies sont distillées puis ajoutées à une essence de bois de santal. La composition de ces parfums huileux, appelés attars, peut être personnalisée en y joignant les ingrédients de son choix : rose, ambre, musc, oliban…
Le parfum devient également un moyen d’exprimer sa culture et son identité, qui concerne aussi bien les hommes que les femmes. Au Moyen-Orient, on n’hésite pas à mélanger les parfums entre eux. Ce processus de layering consiste à superposer différentes fragrances, ce qui accentue encore la personnalisation du parfum : outre le gel douche, on utilise des crèmes et des huiles pour parfumer le corps et les cheveux. On peut ainsi obtenir de nouvelles notes et varier l’intensité de ces accords singuliers. Brûler, respirer, s’imprégner, s’enduire : le peuple arabe ne craint pas le corps à corps avec des odeurs sensuelles et mystérieuses, ambrées et musquées.

AU SOMMAIRE DE NOTRE GRAND DOSSIER « WADI DAWKAH »

Visuel principal : Le souk de Muttrah © Mulook Albalushi / Amouage

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