En direct de Grasse : le Prix du Phénix récompense Quentin Bisch, Isabelle Doyen, Jérôme Épinette… et l’Osmothèque !

Le Prix du Phénix (anciennement Prix François Coty) a réuni ce lundi 16 octobre, à la Bastide Saint-Antoine à Grasse, de nombreux acteurs de l’industrie du parfum pour décerner trois récompenses : le Prix du Phénix, le Prix d’honneur et le Prix international et un prix très spécial.

Relancé en 2018 après quelques années de sommeil, le Prix François Coty connaît une nouvelle impulsion.

Un nouveau nom, d’abord : le Prix du Phénix. Véronique Coty, sa directrice et infatigable animatrice, explique en effet avoir voulu étendre l’audience de ce prix à un public plus large, tout en conservant un lien symbolique avec son illustre ascendant, en faisant référence aux armoiries familiales.

Comme un symbole, cette édition 2023 s’est également déplacée, de façon inédite, à Grasse. On pourrait en effet presque parler de renaissance d’une capitale mondiale du parfum que l’inscription en 2018 des « savoir-faire liés au parfum en Pays de Grasse » au patrimoine de l’Unesco a replacée sur le devant de la scène parfumée. Portée par le maire Jérôme Viaud, parrain de la cérémonie, la ville s’emploie à encourager de nombreuses initiatives de l’écosystème, comme le Simppar (Salon international des matières premières pour la parfumerie), qui après 30 ans d’existence s’y transportera en mai 2024, comme l’annonçait Thierry Duclos dans l’entretien accordé à Nez en juin dernier. Et aujourd’hui le Prix du Phénix, qui vient conclure un week-end consacré au parfum à Grasse, à travers plusieurs conférences (Élisabeth de Feydeau, Osmothèque, Antoine Leclef – jardinier de la Villa Botanica) et la traditionnelle Journée du parfum, organisée par le Rotary Club de Grasse.

Au cœur de la mission que s’est fixée le Prix du Phénix, on trouve la mise en avant de la création et surtout des créateurs de parfums. Il récompense en effet ceux qui par leur carrière exemplaire ont su poser « une empreinte singulière dans le paysage olfactif contemporain, entre créativité, technicité et modernité ». On compte parmi ses précédents lauréats des parfumeurs et parfumeuses incontournables : Alberto Morillas, Olivier Polge, Francis Kurkdjian et Olivier Pescheux. 

En 2022, il avait été décerné à Delphine Jelk, parfumeuse maison chez Guerlain, qui en ce lundi 16 octobre a passé le relais à Quentin Bisch[1]Vous pouvez visionner le discours de remerciement de Quentin Bisch sur notre compte Instagram. Celui-ci occupe depuis quelques années une place privilégiée dans l’industrie. Travaillant aussi bien pour le grand public que pour des maisons indépendantes, il a su imprimer un style singulier à ses créations.  On lui doit entre autres Vétiver écarlate, Cédrat céruse et Iris de gris de la collection du « Potager » de l’Artisan parfumeur, qui faisait partie de nos favoris 2022 ; B683, Ganymède et Encelade de Marc-Antoine Barrois ; ou encore du très réussi Angel Muse pour Thierry Mugler.
S’il fait aujourd’hui partie de l’équipe de parfumeurs de la maison de composition Givaudan, il a été formé initialement à Grasse, chez Robertet, par Michel Almairac qui avait lui-même reçu un Prix d’honneur en 2018.

Ce même Prix d’honneur a été cette année décerné à Isabelle Doyen, qui succède à Émilie Coppermann (Symrise – 2018), Christopher Sheldrake (Chanel – 2021) et Anne Flipo (IFF) qui en tant que récipiendaire 2022 lui a remis la récompense lors de la cérémonie.
On connaît bien Isabelle Doyen pour son étroite collaboration avec Annick Goutal et depuis de nombreuses années avec sa fille, Camille Goutal, avec qui elle a créé la marque Voyages imaginaires. Elle incarne, pour la commission technique, « une parfumerie sensible, inventive et audacieuse. » On ne peut qu’acquiescer : Nuit de bakélite de Naomi Goodsir, ou encore L’Eau des immortels cocréé avec Camille Goutal font partie de nos coups de cœur absolus. Peut-être tout autant que ses créations, on retiendra qu’elle a marqué de son talent et de sa bienveillance des générations de parfumeurs et parfumeuses : de nombreux étudiants de l’Isipca, qu’ils œuvrent en tant que créateurs indépendants ou dans des maisons de composition, ont bénéficié de son enseignement au sein de l’école versaillaise.

Le dernier des trois prix, créé en 2022 et décerné alors à Philippe Paparella-Paris (Symrise), est venu récompenser le travail de Jérôme Épinette qui depuis le bureau de création new yorkais de Robertet est notamment le compositeur des parfums de la marque Byredo. C’est d’ailleurs un parfum de la marque suédoise, Vanille antique, qu’il a choisi pour concourir.

Invitée surprise, mais de marque, l’Osmothèque a été distinguée en fin de cérémonie. Thomas Fontaine (Président), Anne-Cécile Pouant (Directrice), Isabelle Chazot (Directrice du comité scientifique) et Christopher Sheldrake (vice-président) sont montés sur scène pour recevoir, au nom du conservatoire international du parfum, un prix inédit, récompensant l’implication de l’association et de ses bénévoles en faveur du patrimoine de la parfumerie. Et qui d’autre pour cette remise de prix que le facétieux Marc-Antoine Corticchiato (Parfum d’empire), lui qui perpétue avec passion et authenticité une tradition rare, celle de parfumeur et de fondateur d’une marque de parfum ? Comme un certain François Coty.

Tel le phénix, souhaitons à ces lauréats d’entrer dans la légende… du parfum.

Le Prix du Phénix. Comment ça marche ? 

La sélection des nominés est confiée à la commission technique de l’association du Phénix. Composée de maîtres parfumeurs, de membres de la Société française des parfumeurs et de l’Osmothèque de Versailles, celle-ci élabore chaque année au mois de mai une liste de parfumeurs-créateurs au sommet de leur art, et ayant créé au moins un parfum commercialisé pendant l’année qui précède. L’association propose à ces parfumeurs de concourir dans les catégories Prix du Phénix et Prix International S’ils acceptent, ces derniers doivent faire parvenir trois parfums de leur choix, représentatifs de leur signature et leur style. Certaines années, la commission technique choisit également d’attribuer un Prix d’honneur : celui-ci n’est pas soumis au vote du jury. 

L’élection des lauréats est faite par un jury composé de parfumeurs reconnus, généralement entre 6 et 8. Ses membres reçoivent l’ensemble des parfums soumis par les nominés dans un coffret anonymisé. Les fragrances y sont présentées dans des flacons génériques numérotés, afin que le choix du jury puisse se baser uniquement sur la dimension olfactive des créations. Chaque membre du jury choisit trois nominés par catégorie : il attribue trois points à son favori, deux au deuxième, et un au troisième. Un huissier collecte tous les votes et dresse un procès-verbal. Seuls les lauréats sont annoncés : les autres candidats ne sont pas dévoilés, et ils peuvent être sélectionnés à nouveau dès l’année suivante. 

Visuel principal : © Laurent Zabulon

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