Jean Kerléo, disparition du patriarche de la parfumerie

Mort hier à 93 ans, le parfumeur aura marqué l’histoire de la profession comme étant l’un des premiers à chercher à préserver et valoriser le patrimoine mondial de la parfumerie avec la création de l’Osmothèque en 1990.

Né dans une famille d’agriculteurs bretons en 1932, Jean Kerléo entre en 1955, par l’entremise d’un cousin parfumeur, comme préparateur chez Helena Rubinstein. Formé en interne au métier de parfumeur-créateur, il est notamment chargé de parfumer les cosmétiques de la marque. En 1965, il reçoit le Prix des parfumeurs de France, avant d’être recruté deux ans plus tard chez Jean Patou pour créer les parfums à la suite d’Henri Alméras et Henri Giboulet.

Crédit image : Per Fumum
Jean Kerléo (crédit @Per Fumum)

Après une eau de toilette Lacoste (alors dans le giron de la maison) en 1967, le président de Patou Raymond Barbas lui demande un parfum « somptueux, exubérant, déraisonnable ». Pendant trois ans, Jean Kerléo cisèle rose et jasmin de Grasse, osmanthus (jusque là très peu utilisé), santal et fond chypré pour composer 1000 en 1972. Il signe ensuite l’Eau de Patou en 1976, Patou pour homme en 1980, Ma Liberté en 1987, Sublime en 1992, Voyageur en 1995. Dans les années 1980, il réorchestre aussi à la demande d’anciennes clientes douze créations disparues de Patou, parmi lesquelles les célèbres Vacances et Chaldée

Cette tâche de reconstitution et d’adaptation, menée à partir des formules d’origine, le conduit à fonder en 1990 avec quelques autres pionniers l’Osmothèque, véritable conservatoire international du parfum, afin de préserver le patrimoine de la profession. Il préside cette institution unique au monde jusqu’en 2008, avant de laisser sa place à Patricia de Nicolaï, puis à Thomas Fontaine depuis 2020.

Aujourd’hui, si les parfums Patou ont disparu corps et bien avec le rachat de la maison par LVMH en 2018, l’héritage de Jean Kerléo perdure à travers le développement de l’Osmothèque. Celle-ci bénéficiera à la rentrée de locaux plus vastes situés dans le centre-ville de Versailles. Une bonne occasion de (re)découvrir quelques unes des 6000 créations qui y sont conservées dans leur formulation originale, et que les professionnels de la parfumerie comme le grand public peuvent sentir à l’occasion de conférences – et une manière de rendre hommage à cette figure incontournable de l’industrie .

Illustration : Amélie Fontaine

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